Sanctions travail dissimulé : quels sont les risques ?

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Welink Legal

La lutte contre le travail dissimulé est une priorité constante du législateur et des différents organismes de contrôle : inspection du travail, contrôles Urssaf, douanes…

En 2019, les redressements de cotisations liés au travail illégal ont représenté 708,31 millions d’euros, en progression de 10,5 % par rapport à 2018 (source : Acoss). C'est donc plus que jamais un sujet d'actualité. 

Le « travail au noir » est caractérisé par la dissimulation d'une activité ou d'un emploi salarié : défaut d'une déclaration d'embauche, emploi systématique de travailleurs non déclaré, absence de déclarations sociales…

Il s'agit d'une infraction pénale dont devra répondre personnellement l’employeur. Les conséquences peuvent être très lourdes : peines d'emprisonnement, fortes amendes, fermeture d'établissement ...

Avant de détailler les différentes sanctions travail dissimulé, faisons d'abord un bref rappel des grands principes de ce délit. 

Travail dissimulé : de quoi s'agit-il ? 

Définition du travail dissimulé  

Le travail dissimulé est un délit, défini par les articles L8221-1 et suivants du code du travail.

Il est constitué dans les situations suivantes : 

  • Dissimulation d'activité : activité de l'entreprise sans immatriculation ou sans avoir effectué les déclarations obligatoires aux organismes sociaux

  • Dissimulation d'emploi salarié : 

    • Absence de déclaration préalable à l'embauche

    • Absence de bulletin de paie

    • Indication, sur le bulletin de paie, d'un nombre d'heures effectuées inférieur à la réalité. Par exemple : pas de mention des heures supplémentaires

    • Défaut de déclarations relatives aux salaires et aux cotisations, ou défaut de paiement, auprès des organismes de recouvrement des contributions sociales ou de l'administration fiscale

    • Etc.

Sous-traitance

Le délit de travail dissimulé est également constitué si un prestataire de service n'est pas à jour de ses obligations auprès des organismes sociaux. L'entreprise donneuse d'ordre risque alors d'être condamnée solidairement.

Pour éviter ce risque, il est nécessaire de demander à votre cocontractant une attestation de vigilance. Délivrée par l'URSSAF, elle certifie qu'il est à jour de ses obligations. Elle est obligatoire lorsque le montant du contrat est d'au moins 5 000 euros HT. 

 

Recours à un micro-entrepreneur

S’il travaille pour une seule entreprise, ou sous ses ordres et avec le matériel de celle-ci, s'il ne maîtrise pas son planning… Autant d'indices qui laissent à penser qu'il s'agit d'un salarié déguisé. La relation peut alors être requalifiée en contrat de travail, entraînant une condamnation pour travail dissimulé, en raison du défaut de déclaration. La vigilance est donc de mise.


Sanctions travail dissimulé : qui peut être poursuivi ? 

L'auteur du délit est celui qui a volontairement dissimulé son travail ou celui de ses salariés. Il s'agit la plupart du temps de l'employeur, c’est-à-dire le représentant légal de l’entreprise. 

Il est alors poursuivi directement en tant que personne physique. La société en tant que personne morale peut également être mise en cause. 

Mais d'autres personnes peuvent aussi être poursuivies si elles ont profité sciemment de la situation ou si elles ont aidé à la réalisation de l'infraction. Par exemple : complices, personnes faisant de la publicité…

 

Le salarié concerné peut-il être poursuivi ? 

Au titre du délit de travail dissimulé, non. Néanmoins, le salarié risque d'autres sanctions s’il a : 

  • Accepté, en toute connaissance de cause, de travailler alors que les formalités nécessaires n'étaient pas remplies 

  • Dans le but d'obtenir certaines prestations (allocations chômage ou autres prestations sociales) 

Dans ces conditions, les organismes concernés peuvent prendre certaines sanctions : suppression des allocations chômage, poursuites pénales pour fraude…. En outre, le salarié peut être condamné à une pénalité financière (montant variable selon la gravité des faits, art.L.114-17 code sécurité sociale)

Les sanctions pénales du travail dissimulé

À l'encontre de la personne physique 

Le représentant légal de l'entreprise risque les peines suivantes (art.L.8224-1 et suivants code du travail) : 

  • Emprisonnement de 3 ans et 45 000 euros d'amende 

  • Emprisonnement de 5 ans et 75 000 euros d'amende 

  • Si l’emploi dissimulé concerne un mineur soumis à l’obligation scolaire

  • Si les faits sont commis à l'égard de plusieurs personnes, d'une personne vulnérable ou en état de dépendance apparent ou connu de l'auteur du délit 

  • Une peine de 10 ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende si les faits sont commis en bande organisée

À l'encontre de la personne morale 

L'entreprise peut également être poursuivie en tant que personne morale. Elle risque : 

  • Une amende de 225 000 euros

  • Selon le cas, l'une des peines mentionnées à l'article 131-39 du code pénal. Par exemple : dissolution, fermeture d'établissement, placement sous surveillance judiciaire, etc.

Les sanctions administratives et peines complémentaires

Outre la condamnation pénale, l'auteur du délit risque un certain nombre de sanctions administratives (art L8224-3 code du travail) : 

  • Interdiction d'exercer

  • Exclusion des marchés publics (jusqu'à 5 ans)

  • Affichage ou diffusion de la condamnation pénale

  • Interdiction des droits civiques, civils et de famille 

  • Confiscation 

Autres conséquences et sanctions travail dissimulé

Versement d'une indemnité au salarié concerné

En cas de rupture du contrat de travail, l'employeur doit verser une indemnité au salarié dont il aura dissimulé l'emploi. 

 

Cette indemnité forfaitaire correspond à 6 mois de salaire (art. L. 8223-1 du code du travail), peu importe le motif de rupture du contrat. Elle est cumulable avec les autres sommes dont bénéficie le salarié : indemnité de licenciement, de préavis, de CP, etc.

 

Redressement des cotisations sociales 

Lorsque les agents de contrôle (inspection du travail, douanes, police et gendarmerie...) constatent une infraction de travail dissimulé, l’URSSAF procède à l'annulation des différentes mesures de réduction ou d'exonération des cotisations sociales. Ce redressement s'opère dans la limite de 5 ans, correspondant à la prescription en matière de travail dissimulé (art.L.133-4-2). 

 

Cette annulation des réductions et exonérations est partielle si : 

  • Elle résulte uniquement de la requalification d'une prestation de service en contrat de travail 

  • Ou si elle représente une partie limitée de l’activité ou des salariés régulièrement déclarés

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